Un oratorio, ses silences et quelques rebuts –
Écrits de Tanger et d’ailleurs –
Cheminement III
Scribest, Hoenheim, 2024
160 pages, 16 Euros, 160 dh
13.5×19 cm
Dépôt légal : août 2024
ISBN 979-10-92758-27-6
quatrième de couverture
Avec ce troisième Cheminement, Philippe Guiguet Bologne nous entraîne dans une course effrénée dans son musée personnel, se penchant plus que jamais dans les grandes œuvres maniéristes du Cinquecento, mais encore et toujours dans les tableaux de Henri Matisse, et encore ceux étrangement expressionnistes de Jesse Littell, peintre que le poète course à travers la médina dans une trouble histoire de désir. On rencontre encore Florient, le lecteur-narrateur juif qui s’interroge sur son identité et sa place au Proche-Orient, Salaï qui quitte les toiles de Leonardo pour traverser celles de l’entière histoire de l’art, Samaël qui porte son destin comme Sisyphe son rocher, le photographe Mustapha Sabbagh qui dirige une séance photographique entre érotisme et cannibalisme, Nassim, le cher amant qui a la capacité de se transformer au fil des nécessités du récit… Des miscellanées comme un oratorio à mille voix, ainsi que la poétesse Nicole de Pontcharra avait qualifié les précédents Cheminements, entremêlant des nouvelles de quelques lignes, des poèmes éclatés, des paroles de chansons, des extraits littéraires et d’essais, des notes, des impressions : bref, la vie, la vraie, quand elle mène grand train… Du plaisir, rien que du plaisir !
extrait
Si le lecteur de ces inepties y prend bien garde et autant de soin, se concentrant sur l’épaisseur de la prose, il pourrait devenir l’objet d’une véritable révélation, voyant apparaître sur la page, à l’instar des traces sur le suaire de Turin, le sage, démuni, intense, serein et si lointain visage du Salvator mundi d’Antonello da Messina.
en naîtra un songe, quelques monstres et de bien sombres diableries
je vous ouvre mon mystère
retable, toutes ailes déployées
leporello et boustrophédon
Als das Kind Kind war, erwachte es einmal in einem fremden Bett und jetzt immer wieder, erschienen ihm viele Menschen schön und jetzt nur noch im Glücksfall, stellte es sich klar ein Paradies vor und kann es jetzt höchstens ahnen, konnte es sich Nichts nicht denken und schaudert heute davor.
Le retable, posé sur l’eau, forme un radeau qui saura largement nous sauver de la noyade, tant attendue à ce stade du récit. Bien modeste barge, certes, mais qui saura rester à flot dans le déluge. À sa proue, Nassim regarde l’horizon chavirer. Couvert d’un linceul en guise de pagne, il se tient accroupi, ses bras tendus et écartés devant lui, les coudes appuyés sur les genoux. Il a ceint ses cheveux d’un turban qui lui forme une auréole lumineuse. Il ressemble ainsi à un grand oiseau de proie cloué au sol et prêt à mourir, ou à un Christ descendu de la croix et retenu aux épaules par deux anges invisibles. Les veines qui marbrent ses bras et ses jambes, venant affleurer à peine sous l’ambre de sa peau, lui confèrent l’apparence noueuse de l’écorce d’un vieil olivier, ou de celle d’une terre aride et assoiffée. Je l’imagine encore de la schistosité d’un rocher strié de plis soulevés il y a des millions d’années. Ses larges pieds, aguerris aux longues marches à travers les pages, appuient contre le vieux bois doré du volet central du retable et assurent au jeune homme son équilibre dans le tangage. Nassim est las de devoir toujours ainsi lutter.
la nudité du vieux Noé
colère d’un prophète
quelles bibliques injustices
et Job ce faquin
toujours prêt à être plaint
mektoub sera le dernier mot
d’un tel acabit
freaks
à la bougie il joue de son leporello… Mille e tre !
où trouver le livre
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