Achakkar
Slaïki, Tanger, 2016
214 pages, 10 euros, 100 dirhams
13×21 cm
Dépôt légal : 2016MO2651
ISBN 978–9954–661–83-3
extraits
Vous découvrirez peut-être près de là, pris entre l’ombre de la falaise creusée de sa nécropole punique et celle des fantômes du palais Menebhi, un quartier fait de blancheur et de simplicité, de rires et de violence parfois. Face à la mer, l’embrassant amoureusement, la modestie s’y accorde avec la bonhomie. A Hafa, la falaise est l’un des horizons, curcuma sur l’intensité des bleus du détroit. Vous verrez des enfants, un peu partout. Ils rient et pleurent, deviennent des gnawi aux tabals de fer blanc, se battent dans des joutes où ils sont les derniers chevaliers au monde et en fins stratèges imaginent des batailles qui les rendront princes de leur minuscule fief. Les adolescents, plus calmes, rejoignent la mer avec leurs longues cannes de bambous et s’installent sur les rochers où ils attendent avec une patience de légende que des dorades se laissent séduire par leurs appâts. Plus loin, balancée par les vagues du détroit, une énorme chambre à air de camion servira de chalutier aux pêcheurs accrochés à un filet de fortune. Là, sous le torride soleil d’un été caniculaire, dans l’apaisement des vents, sont hurlés à la gloire de l’immensité les chants populaires qui accompagnent depuis toujours mariages et fêtes. « Laachikin fe Nabi salehou aleh, Allah ouma saleh alik rassoul Allah, jah nabi el hadim, jenat n’sabirin, jenat el kaoum el kafirin, Allah insour Sidi Moulay Driss, tsabarak ala Moulay Sultan ou el Wazara dialou, ou alou, ou hababou, ou jiranou, ouahed, jouge, tleta, tak tak tak tak tak… ». Les éclats de rire rebondissent sur les vagues, emportés par le chergui vers d’autres lieux, d’autres sphères, d’autres univers. Les barques de pêche qui quittent le port vers le travail de nuit ponctuent la scène des blancs et rouges de leurs coques apprêtées et battent l’air du rythme à trois temps de leurs modestes et indestructibles moteurs de chez Baudoin, tandis qu’au large mouille sur l’indigo des eaux quelque cargo peint de vert ou de jaune. Des chiens aboient, le muezzin âgé entonne l’appel à la prière d’une voix incertaine, des femmes s’interpellent et rient depuis les terrasses. L’éternité s’est emparée du quartier Hafa.
résumé
Après Socco, avec Achakkar, sa deuxième promenade tangéroise, Philippe Guiguet Bologne emmène son lecteur, maintenant habitué à « ses manières », du plateau du Marshan, au sortir de la vieille ville, jusqu’au mausolée de Sidi Kacem, au Cap Spartel, en passant par Drabed et les diverses routes de la Montagne. On y rencontre aussi bien ses amis que des grands mondains ou de belles figures du Tanger international, d’anciens aristocrates marocains qui portent sur eux l’histoire du Royaume, comme les pêcheurs de Hafa et les jardiniers de Sidi Masmoudi. Une visite d’un Tanger aux maisons dont les grandes portes cochères sont habituellement fermées, un Tanger de quartiers populaires lumineux et anciens comme l’âme humaine, un Tanger de forêts opulentes et de houles océanes indomptables… Une invitation pour une rare flânerie au cœur de ce monde si touchant et évocateur…
se procurer le livre
L’édition originale de Achakkar est disponible à Tanger aux Insolites, à la librairie des Colonnes, au Cercle des arts et à la Virgule, ainsi que dans de nombreux points de vente (autres librairies, points presse, galeries, maisons d’hôtes, boutiques…).
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